Traduction de la Déclaration provisoire aux médias du Groupe de travail d’experts des Nations Unies sur les personnes d’ascendance africaine.

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Traduction de la Déclaration provisoire aux médias du Groupe de travail d’experts des Nations Unies sur les personnes d’ascendance africaine en conclusion de sa visite officielle en Belgique du 4 au 11 février 2019

Traduction de la Déclaration provisoire aux médias du Groupe de travail d’experts des Nations Unies sur les personnes d’ascendance africaine.

Conclusion visite officielle en Belgique du 4 au 11 février 2019

Document de référence pour le public francophone, traduction de la Ligue de Défense Noire Africaine ( https://liguededefensenoireafricaine.com )

Le texte original en anglais est ici : https://www.ohchr.org/EN/NewsEvents/Pages/DisplayNews.aspx?NewsID=24153&LangID=E

Bruxelles, le 11 février 2019

  1. Le Groupe de travail d’experts sur les personnes d’ascendance africaine remercie le gouvernement belge pour son invitation à se rendre dans le pays du 4 au 11 février 2019 et pour sa coopération. Nous remercions en particulier le Service public fédéral Affaires étrangères, Commerce extérieur et Coopération au développement. Nous remercions également le Bureau régional de l’Europe du HCDH pour son soutien à la visite.
  2. Les opinions exprimées dans cette déclaration sont de nature préliminaire et nos conclusions et recommandations finales seront présentées dans notre rapport de mission au Conseil des droits de l’homme des Nations Unies en septembre 2019.
  3. Au cours de la visite, le Groupe de travail a évalué la situation des droits de l’homme des personnes d’ascendance africaine vivant en Belgique et rassemblé des informations sur les formes de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie, d’afrophobie et de l’intolérance qui y est associée. Le Groupe de travail a étudié les mesures officielles prises et les mécanismes visant à prévenir la discrimination raciale systémique et à protéger les victimes du racisme, ainsi que les réponses à apporter aux multiples formes de discrimination.
  4. Dans le cadre de sa mission d’enquête, le groupe de travail s’est rendu à Bruxelles, Anvers, Liège, Namur et Charleroi. Il a rencontré des hauts responsables du gouvernement belge aux niveaux fédéral, régional, communautaire et local, ainsi que du pouvoir législatif, des forces de l’ordre, des institutions nationales des droits de l’homme, du bureau régional du HCDH, des organisations non gouvernementales, ainsi que des communautés et des personnes œuvrant à la promotion de la droits des personnes d’ascendance africaine en Belgique. Le groupe de travail a visité le Musée royal de l’Afrique centrale (MRAC). Il a également visité la prison de St. Gilles à Bruxelles.
  5. Nous remercions les nombreuses personnes d’ascendance africaine et autres, représentant des organisations de la société civile, des défenseurs des droits de l’homme, des organisations de femmes, des avocats et des universitaires que nous avons rencontrés lors de la visite. Les contributions de ceux qui travaillent pour promouvoir et protéger les droits des personnes d’ascendance africaine, en créant des initiatives et en proposant des stratégies pour lutter contre le racisme structurel, la discrimination raciale, la xénophobie, l’afrophobie et l’intolérance qui y est associée, sont inestimables.
  6. La protection des droits de l’homme et l’interdiction de la discrimination raciale sont inscrites dans les articles 10 à 11 de la Constitution belge. La législation anti-racisme nationale de la Belgique est la loi anti-discrimination de 1981, mise à jour en 2007. Les régions et les communautés ont également une législation anti-discrimination.
  7. Nous nous félicitons des initiatives prises par les gouvernements fédéral, régionaux et communautaires pour lutter contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée. Nous encourageons les efforts de sensibilisation et de soutien à la société civile, notamment par le biais de financements.
  8. Le groupe de travail reconnaît l’important travail du Centre inter-fédéral pour l’égalité des chances (Unia) en matière de protection et de promotion des droits de l’homme et de documentation du racisme et des inégalités aux niveaux fédéral et régional. Unia fournit également des recommandations sur la participation, la tolérance, la discrimination et la diversité, ainsi que sur leur mise en œuvre en Belgique. Ses baromètres sur la diversité fournissent des informations importantes sur la situation des droits de l’homme des personnes d’ascendance africaine.
  9. Tout au long de notre visite, nous avons apprécié la volonté des autorités publiques de débattre de la manière dont les institutions publiques et privées peuvent entretenir les disparités raciales. Nous nous félicitons du réseau national d’experts en matière de criminalité contre les personnes, qui constitue une infrastructure solide pour lutter contre les crimes motivés par la haine. À Bruxelles, Anvers, Liège, Namur et Charleroi, le groupe de travail a reçu des informations sur l’intégration sociale et les efforts interculturels en faveur des nouveaux arrivants, y compris l’orientation vers des cours de langue. À Liège, nous nous félicitons de l’engagement inscrit dans la Charte, Liège contre le racisme .
  10. Le groupe de travail se félicite également des initiatives prises par la société civile pour promouvoir la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine en Belgique.
  11. La diaspora africaine en Belgique s’exprime notamment par le biais de manifestations culturelles telles que le festival de la congolisation, afin de souligner la contribution des artistes congolais au paysage culturel belge et de faire en sorte que les gens commencent à apprécier et à réfléchir sur le patrimoine artistique de la diaspora.
  12. En dépit des mesures positives susmentionnées, le Groupe de travail est préoccupé par la situation des droits de l’homme des personnes d’ascendance africaine en Belgique victimes de racisme et de discrimination raciale.
  13. Il est clair que la discrimination raciale est endémique dans les institutions en Belgique. La société civile a signalé des manifestations communes de discrimination raciale, de xénophobie, d’afrophobie et de l’intolérance qui y est associée et auxquelles sont confrontées les personnes d’ascendance africaine. Les causes profondes des violations actuelles des droits de l’homme résident dans le manque de reconnaissance de l’ampleur réelle de la violence et de l’injustice de la colonisation. En conséquence, le discours public ne reflète pas une compréhension nuancée de la manière dont les institutions peuvent conduire à l’exclusion systémique de l’éducation, de l’emploi et des opportunités. Le groupe de travail conclut que les inégalités sont profondément enracinées en raison de barrières structurelles qui se croisent et se renforcent mutuellement. Des efforts crédibles pour lutter contre le racisme exigent d’abord de surmonter ces obstacles.
  14. Nous notons avec préoccupation les monuments publics et les monuments commémoratifs dédiés aux officiers du roi Léopold II et de Force Publique, en raison de leur complicité dans les atrocités commises en Afrique. Le groupe de travail est d’avis que pour clore le chapitre sombre de l’histoire, la réconciliation et la guérison, il est impératif que les Belges doivent enfin affronter et reconnaître le rôle joué par le roi Léopold II et la Belgique dans la colonisation et son impact à long terme sur la Belgique et l’Afrique. 
  15. Le discours postcolonial le plus visible dans une institution publique belge a lieu au sein du Musée royal de l’Afrique centrale (MRAC) récemment rouvert, qui est à la fois une institution de recherche et une institution culturelle. Le MRAC a cherché à revoir son approche pour y inclure une analyse postcoloniale critique – un changement important pour une institution initialement chargée de diffuser la propagande coloniale. Le groupe de travail est d’avis que la réorganisation du musée n’a pas été suffisamment poussée. Pour les communautés engagées dans un discours postcolonial dynamique, à savoir la société civile et les activistes, la réorganisation n’atteint pas son objectif de fournir un contexte adéquat et une analyse critique. Le groupe de travail note qu’il est important d’éliminer toute propagande coloniale et de présenter avec précision les atrocités du passé colonial de la Belgique. Le MRAC admet que la décolonisation est un processus et signale son intention d’évoluer vers le partage du pouvoir avec les personnes et les institutions d’ascendance africaine.
  16. Le Groupe de travail se félicite de ce processus de décolonisation, étant donné que même la production culturelle récente en Belgique reflète les legs durables du passé colonial. Par exemple, une exposition de huit Africains dans un zoo privé en Belgique en 2002 (des Camerounais amenés en Belgique sans visa) rappelle les «zoos humains» notoires de la Belgique entre 1897 et 1958.
  17. Entre 1959 et 1962, des milliers d’enfants nés de pères blancs et de mères africaines au Congo, au Rwanda et au Burundi, gouvernés par la Belgique, auraient été enlevés et envoyés en Belgique pour adoption. Le groupe de travail note avec approbation que l’appel des Métis de Belgique de 2016 en faveur de la reconnaissance des États a suscité des excuses de la part de l’Église catholique l’année suivante, ainsi qu’une résolution parlementaire de 2018 sur la ségrégation subite par les métis de la colonisation belge en Afrique . Le groupe de travail se félicite de l’octroi d’un financement pour la collecte de données, la recherche et la responsabilité dans ce cadre.
  18. La Belgique fait souvent référence à des objectifs interculturels plutôt que multiculturels dans l’idée de préserver le patrimoine et les pratiques culturels tout en coexistant dans la paix et la prospérité, dans le respect des intersections et de l’interaction des différentes cultures. Cette diversité comprend des citoyens, des migrants, des personnes de première, deuxième et troisième générations, des personnes très instruites et des groupes qui ont énormément contribué à l’état belge moderne. L’interculturalité exige la réciprocité, le rejet des stéréotypes culturels préjudiciables et la valorisation de toutes les cultures, y compris celles des personnes d’ascendance africaine.
  19. Le groupe de travail note avec préoccupation l’absence de données ventilées fondées sur l’origine ethnique ou la race. Des données ventilées sont nécessaires pour garantir la reconnaissance des personnes d’ascendance africaine et surmonter l’invisibilité sociale historique. Sans ces données, il est impossible de garantir que les engagements déclarés de la Belgique en matière d’égalité sont effectivement réalisés. Certains organes antidiscriminatoires ont trouvé des données indirectes (relatives à l’origine parentale) qui ont alimenté des analyses sur l’égalité et le racisme; des données supplémentaires relatives au regroupement familial (et d’autres données) peuvent également étendre ces analyses aux citoyens belges d’ascendance africaine.
  20. La Belgique a un système politique complexe. Cela ne doit pas entraver le respect de ses obligations en matière de lutte contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée. L’absence d’une institution nationale des droits de l’homme de statut A et d’un plan d’action national de lutte contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie, l’afrophobie et l’intolérance qui y est associée doit être abordée. La Belgique devrait s’engager activement dans un partenariat avec les personnes d’ascendance africaine, en particulier des experts en navigation dans ces complexités, afin de promouvoir l’égalité et de réduire les disparités raciales profondément enracinées.
  21. Le groupe de travail note que la société civile et les forces de l’ordre reconnaissent la prédominance du profilage racial dans les activités de la police. Les politiques antiterroristes auraient contribué à accroître le profilage racial par les forces de l’ordre. La police fédérale a pris acte de l’inquiétude suscitée par le profilage racial et a fourni des informations supplémentaires sur une étude pilote menée à Malines afin de documenter tous les arrêts et toutes les recherches (y compris une base narrative pour l’arrêt) sur une période de deux ans. Cependant, on ne sait pas comment cela peut effectivement cibler le profilage racial, car la race des membres de la communauté arrêtés par la police ne figure pas parmi les données saisies dans le rapport d’arrêt.
  22. Le groupe de travail a visité la prison de St. Gilles à Bruxelles. Le groupe de travail a constaté que la prison était délabrée et surpeuplée. Son déménagement est prévu pour 2022. Les grèves fréquentes du personnel pénitentiaire ont un impact considérable sur les conditions de détention des personnes incarcérées, y compris les suspensions de visites, les douches, l’accès au téléphone, les loisirs et les verrouillages prolongés. Les détenus ont également exprimé leur préoccupation face au manque d’attention accordée à leurs demandes de soins médicaux. Des cas individuels de comportement raciste de la part de gardes ont également été rapportés, et l’administration s’est engagée à conseiller individuellement les auteurs et à adopter une tolérance zéro pour le racisme.
  23. Le Groupe de travail note avec une profonde préoccupation le manque de représentation des personnes d’ascendance africaine dans les domaines judiciaire, de l’application de la loi, des services gouvernementaux, des services correctionnels, des conseils municipaux, des parlements régionaux et fédéral. Ces institutions ne reflètent pas la diversité de la population belge. Lorsque le groupe de travail s’est rendu en Belgique en 2005, la police fédérale a signalé l’existence d’un programme de recrutement solide pour promouvoir la diversité. Bien que ce programme ait de nouveau été présenté comme un engagement sérieux, aucune donnée n’est actuellement disponible pour établir quelles améliorations, le cas échéant, ont été apportées au cours des 14 dernières années et si le programme a été couronné de succès.
  24. Des membres de la société civile et des membres de la communauté ont souligné l’absence de modèles positifs dans les médias, les panneaux d’affichage, la télévision et les films belges. La Communauté française a fait référence aux meilleures pratiques concernant un baromètre de la presse écrite visant à mesurer l’égalité et la diversité parmi les journalistes et le contenu des informations, et à créer un groupe d’experts pour élargir la représentation. 
  25. Le groupe de travail a relevé des lacunes dans l’exercice des droits économiques, sociaux et culturels chez les personnes d’ascendance africaine en Belgique. Selon les recherches, 60% des Afro-Belges ont un niveau d’instruction élevé, mais ils sont quatre fois plus susceptibles d’être au chômage que la moyenne nationale. Quatre-vingt pour cent affirment avoir été victimes de discrimination dès leur plus jeune âge. Les fonctionnaires ont systématiquement rationalisé l’exclusion systématique des personnes d’ascendance africaine en faisant référence à la langue et à la culture, même dans les cas impliquant des Belges de deuxième génération. 
  26. Les membres de la société civile ont répété à maintes reprises au groupe de travail que les Belges d’ascendance africaine étaient confrontés à un «déclassement» et à d’autres problèmes d’emploi. Les diplômés universitaires et diplômés ont déclaré travailler bien au-dessous de leur niveau d’instruction, y compris les travaux manuels bien qu’ils possèdent des certificats universitaires délivrés par des universités belges. Ils ont également souligné la difficulté d’obtenir la reconnaissance des diplômes étrangers. Ils ont également signalé une exclusion systématique de l’aide à l’emploi, les centres pour l’emploi ayant refusé de renvoyer les personnes d’ascendance africaine vers des opportunités d’emploi correspondant à leur niveau d’instruction. UNIA a également documenté une dégradation généralisée de l’emploi et la prévalence des personnes d’ascendance africaine qui travaillent bien en dessous de leur niveau d’éducation, bien qu’elles comptent parmi les plus éduquées de la société belge.
  27. Le groupe de travail s’inquiète de ce que les programmes des écoles primaires et secondaires ne reflètent pas de manière adéquate l’histoire de la colonisation ainsi que l’histoire et les contributions des personnes d’ascendance africaine en Belgique. Que l’histoire coloniale de la Belgique soit mentionnée dépend en grande partie de l’intérêt et de l’initiative de chaque enseignant. Là où le programme existe, il semble récapituler la propagande coloniale, y compris la suggestion que le développement économique est venu en Afrique à la suite de la colonisation en omettant de faire référence à des personnalités historiques d’ascendance africaine telles que Patrice Lumumba. Selon les témoignages, un quart des diplômés du secondaire ne savent pas que le Congo était une ancienne colonie belge.
  28. Lors de chaque interaction avec la société civile, le Groupe de travail a entendu des témoignages sur la pratique systématique consistant à détourner les enfants d’ascendance africaine vers une formation professionnelle ou manuelle et de les écarter de la trajectoire de l’enseignement général. Cela a de graves répercussions sur le droit à l’éducation et le droit à l’enfance. Les parents ont déclaré s’être battus pour empêcher leurs enfants d’être détournés, s’opposer aux transferts pour la formation professionnelle, éviter de faire classer leurs enfants avec des troubles du comportement ou d’apprentissage et menacer de faire appel à des services de protection de l’enfance. Quelques parents ont discuté de stratégies créatives pour naviguer dans ces systèmes et sécuriser l’éducation de leurs enfants, notamment en utilisant le processus de test scolaire à domicile et en inscrivant leurs enfants dans un internat.
  29. Plusieurs membres de la communauté ont discuté de l’impact grave sur leur santé mentale dû à la discrimination raciale. Cela incluait des insultes raciales individualisées et des traitements hostiles, et plusieurs membres de la société civile de différents endroits ont mentionné l’impact dramatique du racisme quotidien sur leur vie – y compris la dépression et le fait de se retirer – et le fait que personne dans les écoles de leurs écoles ne s’était jamais aperçu ni intervenu .
  30. La société civile a signalé de fréquentes discriminations sur les marchés du logement et de la location. Ils seraient immédiatement rejetés par les propriétaires qui pourraient détecter un accent africain au téléphone, qui ont reconnu leurs noms en tant qu’Africains ou qui ont informé que l’appartement n’était pas disponible une fois qu’ils ont rencontré le propriétaire en face à face. Le gouvernement a été informé de l’utilisation d’appels mystérieux, une procédure impliquant l’utilisation de testeurs lorsque les propriétaires ont été identifiés comme potentiellement discriminants de manière illégale. Le programme n’a été lancé que récemment, conformément au rapport Unia et conjointement avec eux, et peu de dossiers avaient été complétés au moment de notre visite. 
  31. Des membres de la société civile et des membres de la communauté ont déclaré au groupe de travail sur l’intersectionnalité que les personnes répondant aux critères de plusieurs groupes marginalisés peuvent être particulièrement vulnérables, faire face à une violence et à un harcèlement extrêmes, tout en restant souvent invisibles ou dépourvues de priorité, même au sein de communautés d’ascendance africaine. Cela est particulièrement vrai pour les sans-papiers d’ascendance africaine dont la vie est particulièrement précaire et qui ne sont pas régularisés depuis des années. En outre, les femmes d’ascendance africaine, en particulier les migrantes récentes, ont du mal à obtenir justice, un soutien social, voire un abri pour la violence domestique.
  32. Les personnes d’ascendance africaine et d’identité religieuse musulmane ont demandé pourquoi les forces de l’ordre avaient présumé de liens terroristes. Certains responsables publics ont implicitement reconnu leur rôle à cet égard, notamment en défendant l’utilisation du profilage racial en tant que tactique antiterroriste et en suggérant une fausse équivalence entre les efforts anti-radicalistes et les programmes antiracistes, c’est-à-dire en ne comprenant pas que les suppositions racistes relatives au radicalisme sont inexactes, fondées sur des préjugés et détournent des ressources essentielles de la protection de la société belge contre les menaces réelles.
  33. Le groupe de travail s’inquiète de la montée du nationalisme populiste, du discours de haine raciste et du discours xénophobe en tant qu’outil politique. Nous réitérons les préoccupations exprimées par le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale en 2015 selon lesquelles le gouvernement n’a toujours pas adopté de législation déclarant les organisations qui promeuvent et incitent à la discrimination raciale illégale, conformément à l’article 4 de la Convention.
  34. L’utilisation de blackface, de caricatures racialisées et de représentations racistes de personnes d’ascendance africaine est choquante, déshumanisante et méprisante. Malheureusement, la republication de Tintin au Congo inédite et sans contextualisation perpétue les stéréotypes négatifs et devrait être supprimée ou contextualisée avec un addendum reflétant les engagements actuels en matière de lutte contre le racisme.
  35. Le groupe de travail a eu peu de connaissances sur la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine. La société civile est prête à soutenir la mise en œuvre du Programme d’activités de la Décennie internationale.  
  36. Les recommandations suivantes sont destinées à aider la Belgique dans ses efforts pour lutter contre toutes les formes de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie, d’afrophobie et de l’intolérance qui y est associée:
  37. Le gouvernement belge devrait adopter un plan d’action national inter-fédéral complet contre le racisme, respectant les engagements pris en 2002 à la suite de la Conférence mondiale contre le racisme. Le plan d’action national contre le racisme devrait être élaboré en partenariat avec les personnes d’ascendance africaine.
  38. Adopter une stratégie nationale pour l’inclusion des personnes d’ascendance africaine en Belgique, y compris les migrants, et créer une plate-forme nationale pour les personnes d’ascendance africaine.
  39. Mettre en place une institution nationale des droits de l’homme indépendante, conformément aux Principes de Paris et en partenariat avec les personnes d’ascendance africaine.  
  40. Le gouvernement devrait envisager de ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.
  41. Le Groupe de travail prie instamment le Gouvernement de se conformer aux recommandations formulées par l’Unia, notamment celles relatives à la lutte contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée.
  42. Le groupe de travail demande instamment au gouvernement de financer des projets créatifs de personnes d’ascendance africaine telles que la Maison de la culture africaine, entre autres, dans le but de renforcer la visibilité de toutes les formes d’expression africaine et de préserver l’histoire et la mémoire de la diaspora africaine.  
  43. Nous exhortons les universités de toute la Belgique à créer des chaires en études africaines et à donner la priorité à l’embauche de professeurs d’ascendance africaine afin de favoriser la recherche et la diffusion des connaissances dans ce domaine, ainsi que de diversifier l’académie.
  44. Le gouvernement devrait veiller à financer les associations de lutte contre le racisme dirigées par des personnes d’ascendance africaine afin de leur permettre d’être des partenaires dans la lutte contre le racisme. Le groupe de travail recommande également des mécanismes de financement inclusifs pour les entrepreneurs d’ascendance africaine.
  45. Nous nous félicitons de l’attribution du nom de l’ancien Square du Bastion à la place Patrice Lumumba en juin 2018, ainsi que d’une exposition commémorative sur les soldats congolais qui ont combattu pendant la Première Guerre mondiale et encourageons la commémoration durable et continue des contributions des personnes d’ascendance africaine et le retrait des marqueurs. de la période coloniale.  
  46. Nous exhortons le gouvernement à reconnaître et à rendre visible les personnes tuées au cours de la période de colonisation, les soldats congolais ayant combattu pendant les deux guerres mondiales et à reconnaître les contributions culturelles, économiques, politiques et scientifiques des personnes d’ascendance africaine à la guerre. développement de la société belge par la mise en place de monuments, de mémoriaux, de noms de rues, d’écoles, de bâtiments municipaux, régionaux et fédéraux. Cela devrait être fait en consultation avec la société civile.
  47. Le Groupe de travail recommande la justice réparatrice en vue de clore le chapitre sombre de l’histoire et en tant que moyen de réconciliation et de guérison. Nous exhortons le gouvernement à présenter des excuses pour les atrocités commises pendant la colonisation. Le droit à réparation pour les atrocités commises dans le passé n’est soumis à aucune prescription. Le groupe de travail recommande le plan d’action en dix points de la CARICOM pour la justice réparatrice comme cadre directeur.
  48. Le groupe de travail soutient la création d’une commission vérité et le projet de loi devant le Parlement intitulé «Plan de travail mémorial établissant les faits et les implications des institutions belges au Congo, au Rwanda et au Burundi», daté du 14 février 2017.
  49. Les autorités devraient garantir un accès complet aux archives utiles aux recherches sur le colonialisme belge.
  50. Le groupe de travail demande instamment aux autorités compétentes de veiller à ce que le MRAC se voit confier des tâches et des responsabilités dans le contexte de la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine. Dans ce contexte, le groupe de travail recommande de doter le MRAC de ressources financières et humaines appropriées lui permettant d’exploiter pleinement le potentiel de cette institution et de poursuivre l’amélioration et l’enrichissement de son contenu, contribuant ainsi à une meilleure prise de conscience et à une meilleure compréhension. héritage tragique du colonialisme belge, ainsi que les défis passés et actuels en matière de droits de l’homme des personnes d’ascendance africaine.
  51. Le groupe de travail encourage le MRAC, en collaboration avec des historiens de l’Afrique et de la diaspora, à supprimer toutes les expositions racistes offensantes et à garantir des explications détaillées et un contexte permettant d’informer et d’éduquer les visiteurs sur l’histoire coloniale de la Belgique et son exploitation de l’Afrique.
  52. Le groupe de travail demande instamment au gouvernement de fournir un financement spécifique et ciblé au MRAC afin d’enrichir son analyse postcoloniale. Ce financement devrait permettre des innovations telles que les codes QR sur les pancartes des musées, afin de fournir plus de contexte et d’enrichir les analyses intersectionnelles, notamment les interactions historiques et actuelles entre race, genre, sexualité, statut migratoire, religion et autres critères pertinents.
  53. Le groupe de travail demande instamment au gouvernement de soutenir financièrement une campagne d’éducation du public en partenariat avec les personnes d’ascendance africaine, afin de mieux connaître et comprendre l’héritage du colonialisme belge.
  54. Le groupe de travail recommande vivement au gouvernement de collecter, compiler, analyser, diffuser et publier des données statistiques fiables, ventilées par race et sur la base de l’auto-identification volontaire, et prend toutes les mesures nécessaires pour évaluer régulièrement la situation des personnes et des groupes de personnes sont victimes de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l’intolérance qui y est associée.
  55. Le groupe de travail demande au gouvernement de s’attaquer au profilage racial et d’instaurer une politique de documentation et d’analyse des arrêts et des perquisitions à l’échelle nationale, y compris la race et la couleur de la peau, afin de promouvoir et d’assurer l’égalité et la justice des activités de maintien de l’ordre; atténuer l’application sélective de la loi; traiter les préjugés persistants, les stéréotypes et les croyances concernant la nécessité de surveiller et de contrôler les personnes d’ascendance africaine.
  56. Veiller à ce que le cadre solide mis en place pour la poursuite des crimes de haine soit davantage utilisé dans la pratique.
  57. Examiner les initiatives en matière de diversité dans les institutions judiciaires ainsi que dans d’autres secteurs, notamment l’éducation et les médias, afin de définir des critères clairs permettant d’accroître la diversité de manière mesurable, de surmonter la discrimination structurelle et les préjugés inconscients au moyen de mesures positives, conformément aux dispositions de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes. discrimination raciale.
  58. Clarifier et simplifier la compétence des autorités antidiscriminatoires, en créant un guichet unique pour faciliter le signalement des victimes et pour coordonner et renforcer la responsabilité des auteurs de harcèlement et de violence racistes, y compris des procédures judiciaires accélérées.
  59. Le gouvernement devrait examiner et veiller à ce que les manuels scolaires et le matériel pédagogique reflètent avec exactitude les faits historiques liés aux tragédies et aux atrocités du passé, telles que l’esclavage, le commerce des Africains réduits en esclavage et le colonialisme. La Belgique devrait utiliser l’Histoire générale de l’Afrique de l’UNESCO pour éclairer son programme d’enseignement, parmi des textes faisant autorité de même orientation. Nous exhortons le gouvernement à promouvoir une connaissance, une reconnaissance et un respect accrus de la culture, de l’histoire et du patrimoine des personnes d’ascendance africaine vivant en Belgique. Cela devrait inclure l’enseignement obligatoire de l’histoire coloniale de la Belgique à tous les niveaux du système éducatif.
  60. Les ministères de l’éducation et les communautés locales doivent déterminer s’il existe une différence statistiquement significative dans le détournement des enfants d’ascendance africaine de l’enseignement ordinaire vers les filières d’enseignement professionnel ou technique, par rapport aux enfants belges de race blanche. 
  61. Tous les enseignants doivent suivre une formation antiraciste, y compris une formation sur les préjugés implicites et des manifestations spécifiques dans le cadre de leur travail. La formation devrait comporter des tests pour évaluer la compréhension de la diversité chez les enseignants.
  62. Tous les agents publics chargés de responsabilités en matière d’éducation doivent élaborer des processus et des critères clairs, objectifs et transparents qui régissent le moment où un enfant doit être détourné de l’enseignement ordinaire, de la nécessité de se prémunir contre les préjugés implicites et les résultats fondés sur la race dans la prise de décision, ainsi que du droit. des parents à résister ou à rejeter les recommandations des enseignants sans harcèlement.
  63. Le gouvernement devrait prendre toutes les mesures nécessaires pour lutter contre la discrimination raciale et garantir la pleine mise en œuvre du droit à un niveau de vie suffisant, notamment du droit à un logement convenable, à l’accès à des soins de santé abordables, à l’emploi et à l’éducation pour les personnes d’ascendance africaine.  
  64. Investir dans des mesures intégrées de renforcement de la confiance entre la police, les institutions judiciaires, l’Unia, les institutions d’intégration sociale, les associations antiracistes et les victimes de discrimination raciale et de violence fondée sur le sexe et la race, afin de garantir que les actes racistes, la violence ou les crimes soient systématiquement dénoncés , poursuivi et indemnisé.
  65. La Belgique devrait procéder à un audit de l’équité raciale au sein de ses institutions publiques et inciter les employeurs et les institutions privés à faire de même. L’audit a pour objet de rechercher les biais systémiques et la discrimination dans le cadre des activités courantes et courantes des entreprises. La Belgique devrait s’engager à publier les résultats et à mettre en œuvre les recommandations développées dans le cadre du processus d’audit.
  66. La Belgique devrait examiner les statistiques et les données indirectes existantes afin de déterminer si les personnes d’ascendance africaine en Belgique, y compris les citoyens belges d’ascendance africaine, connaissent et exercent leurs droits de l’homme conformément aux moyennes de l’ensemble des Belges. Cela inclut des données sur la citoyenneté, le lieu de naissance des parents et les données de regroupement familial pour la réunification des pays d’ascendance africaine.
  67. La Belgique devrait adopter des protocoles clairs, objectifs et transparents pour les agences pour l’emploi, afin de s’assurer qu’elles ne perpétuent pas les stéréotypes et les préjugés, exigeant notamment que les références soient fondées sur le niveau d’éducation ou d’expérience et reconnaissant que la langue ne devrait pas être un facteur de disqualification une fois une compétence mesurable. est déterminé.
  68. Le Groupe de travail recommande au Gouvernement d’appuyer et d’organiser un débat ouvert sur l’utilisation des caricatures noires, racialisées et la représentation raciste des personnes d’ascendance africaine. La republication de Tintin au Congo devrait être retirée ou contextualisée avec un addendum reflétant les engagements actuels en matière de lutte contre le racisme.
  69. Le Groupe de travail appelle les responsables politiques à tous les niveaux de la société à éviter d’instrumentaliser le racisme, la xénophobie et les discours de haine dans l’exercice de leurs fonctions politiques et à les encourager à promouvoir l’inclusion, la solidarité, la non-discrimination et des engagements concrets en faveur de l’égalité. On rappelle également aux médias son rôle important à cet égard.
  70. Le groupe de travail rappelle aux médias leur rôle important en tant que chien de garde public, chargé de veiller à ce que des informations factuelles et fiables sur les personnes d’ascendance africaine soient rapportées.
  71. Le Groupe de travail demande instamment au Gouvernement de faire participer les organisations de la société civile représentant les personnes d’ascendance africaine à l’élaboration des lois importantes qui les concernent et au financement adéquat de ces organisations.
  72. La Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine devrait être officiellement lancée en Belgique au niveau fédéral.
  73. Le groupe de travail encourage également le gouvernement à poursuivre la mise en œuvre du programme de développement durable à l’horizon 2030 en Belgique, en mettant l’accent sur les indicateurs pertinents pour les personnes d’ascendance africaine, en partenariat avec la société civile. Compte tenu du rapport de Statbel sur la pauvreté publié en 2018, le groupe de travail appelle le gouvernement à éliminer le racisme structurel afin d’atteindre les objectifs de développement durable. 
  74. Le Groupe de travail tient à réitérer sa satisfaction devant la volonté du gouvernement d’engager un dialogue, une coopération et des actions pour lutter contre la discrimination raciale. Nous espérons que notre rapport soutiendra le gouvernement dans ce processus et nous exprimons notre volonté d’aider à cette entreprise importante.

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