Afghanistan: LES TALIBANS SONT RENTRES DANS LA CAPITALE KABOUL
Le groupe armé islamique des talibans mène depuis mai une offensive éclair en Afghanistan. Après avoir pris contrôle d’une grande partie du territoire ces dix derniers jours, ils ont fini par pénétrer dans Kaboul, la capitale.
Elle est la dernière grande ville encore sous le contrôle du gouvernement. Mais la situation pourrait changer rapidement. Selon des habitants, les talibans sont entrés ce dimanche à Kaboul, la capitale de l’Afghanistan, mais il n’y a « pas de combats ». De son côté, un porte-parole du groupe armé a affirmé que les combattants avaient ordre de rester aux portes de la ville. Selon un journaliste afghan, les talibans laissent au gouvernement la responsabilité de la sécurité de Kaboul en attendant « une transition ».
Dans sa déclaration, le porte-parole des talibans affirme qu’il souhaite prendre la ville sans combattre pour éviter les victimes civiles et assure que des négociations sont en cours avec le gouvernement, mais qu’il n’y a pas de cessez-le-feu.
La capitale de plus de trois millions d’habitants est la dernière grande cité toujours aux mains du gouvernement. Mais, ce dimanche, le ministre de l’Intérieur a assuré qu’il y aurait un « transfert pacifique du pouvoir à un gouvernement de transition », laissant entrevoir l’arrivée au pouvoir des talibans.
Les talibans mènent une offensive éclair depuis mai et le retrait des troupes de l’Otan et des États-Unis. Cette avancée s’est faite sans rencontrer de grande résistance de la part de la population. Elle s‘est accélérée ces dix derniers jours, avec la prise dimanche matin de Jalalabad notamment.
L’échec du gouvernement
La déroute est totale pour les forces de sécurité afghanes, pourtant financées pendant 20 ans à coups de centaines de milliards de dollars par les États-Unis, et pour le gouvernement du président Ashraf Ghani. Samedi, le chef de l’État avait dit faire de la « remobilisation (des) forces de sécurité et de défense » la « priorité numéro un ». Mais son message, de toute évidence, n’a guère été entendu.
Il avait toutefois ajouté samedi que des « consultations » étaient en cours pour trouver une « solution politique » garantissant la paix et la stabilité. Dans la soirée, le palais présidentiel a précisé qu’une délégation serait « prochainement constituée par le gouvernement et prête à négocier ».
Face à cette situation, les États-Unis et le Royaume-Uni ont annoncé cette semaine l’envoi de milliers de soldats à Kaboul pour évacuer diplomates ou ressortissants. D’autres membres de l’Otan, comme la France, ont aussi annoncé l’évacuation du personnel de leurs ambassades. La France a également annoncé jeudi avoir suspendu dès le début du mois de juillet les expulsions des migrants afghans déboutés de leur demande d’asile vers leur pays d’origine, en raison de la « dégradation de la situation sécuritaire en Afghanistan ».
Joe Biden a affirmé ne pas regretter sa décision de retirer les troupes américaines de l’Afghanistan : « Une année ou cinq années de plus de présence militaire américaine n’auraient fait aucune différence, quand l’armée afghane ne peut ou ne veut pas défendre son propre pays », a-t-il noté dans un communiqué.
Une arrivée qui était crainte dans la capitale
Beaucoup d’Afghans, surtout dans la capitale, et les femmes en particulier, habitués à la liberté qu’ils ont connue ces 20 dernières années, craignaient un retour au pouvoir des talibans. Lorsqu’ils dirigeaient le pays, entre 1996 et 2001, ces derniers avaient imposé leur version ultra-rigoriste de la loi islamique. Les femmes avaient interdiction de sortir sans un chaperon masculin et de travailler, et les filles d’aller à l’école. Les femmes accusées de crimes comme l’adultère étaient fouettées et lapidées. Quasiment toute forme de divertissement était bannie. La musique était interdite, les cinémas fermés, les télévisions pendues aux lampadaires. Les voleurs avaient les mains coupées, les meurtriers étaient exécutés en public et les homosexuels tués.
Les talibans, qui veillent à afficher aujourd’hui une image plus modérée, ont maintes fois promis que s’ils revenaient au pouvoir, ils respecteraient les droits humains, en particulier ceux des femmes, en accord avec les « valeurs islamiques ». Mais dans les zones nouvellement conquises, ils ont déjà été accusés de nombreuses atrocités : meurtres de civils, décapitations, enlèvements d’adolescentes pour les marier de force, notamment.