Mali đČđ± : Le jeu trouble de lâarmĂ©e française Ă Kidal

Le dĂ©saccord entre Paris et Bamako commence en janvier 2013, Ă lâaube de lâopĂ©ration Serval (lâancĂȘtre de Barkhane) menĂ©e par les forces françaises. La France a lancĂ© une guerre Ă©clair contre les groupes jihadistes. La descente vers Mopti de Iyad Ag Ghaly, alors chef dâal-QaĂŻda au Maghreb islamique (devenu le Groupe de soutien Ă lâislam et aux musulmans) et ses hommes est trĂšs vite stoppĂ©e. Les rĂ©gions de Gao et de Tombouctou sont regagnĂ©es. Mais malgrĂ© les succĂšs, une opposition entre Paris et Bamako va trĂšs vite se dessiner. Au centre des dissensions : le rĂŽle que doit jouer le MNLA (ancĂȘtre de la CMA). DĂšs les premiĂšres victoires françaises, les rebelles du MNLA offrent leur aide Ă Paris. Cette alliance dĂ©plaĂźt tant au pouvoir quâĂ lâopinion malienne, mais Paris la scelle.
En effet, en 2013, la majoritĂ© des Maliens nâavait pas compris pourquoi les soldats français avaient empĂȘchĂ© lâarmĂ©e malienne dâentrer Ă Kidal, fief de la rĂ©bellion. ConsĂ©quence : Kidal demeure toujours sous lâemprise des groupes armĂ©s notamment ceux de la coordination des mouvements de lâAzawad (CMA), Ă©chappant ainsi au contrĂŽle de lâEtat. Cette situation provoque la colĂšre des populations qui ont aussi eu le sentiment que la France « collaborait » avec des « ennemis » du Mali.
Beaucoup de Maliens reprochent notamment aux forces françaises de privilĂ©gier les intĂ©rĂȘts de la CMA et sont, de ce point de vue, au centre des alliances entre groupes armĂ©s qui se font et se dĂ©font au rythme des saisons.
Au sein de lâopinion malienne, lâon est convaincu que la rĂ©bellion touarĂšgue a fait un compromis avec lâOtan et la France en abandonnant Kadhafi en pleine crise libyenne. Le marchĂ© Ă©tait que si elle quittait le sud de la Libye, la France lâaiderait au mieux dans ses revendications au Mali. Vrai ou Faux ? Au vu de certains Ă©vĂšnements troublants, lâon est tentĂ© de croire Ă la thĂšse du complot contre le Mali.
Aussi, combattu par leurs alliĂ©s djihadistes, Serval dans son intervention pour libĂ©rer le Mali a permis la rĂ©gĂ©nĂ©ration du MNLA. Et certains mĂ©dias français se sont investis pour sĂ©parer thĂ©oriquement ce mouvement des djihadistes. Alors que lors de lâoccupation du Nord, les populations se sentaient plus en sĂ©curitĂ© avec AQMI et MUJAO quâavec le MNLA qui violait, pillait, volait et tuait sans Ă©tat dâĂąme.
Autant dâactes qui ont longtemps cristallisĂ© la colĂšre des maliens contre la France. Et le fossĂ© sâĂ©largisse, au rythme des actions de Barkhane en faveur de la Coordination des Mouvements de lâAzawad (CMA), chaque fois que celle-ci est menacĂ©e. En novembre 2019, de violents affrontements avaient opposĂ© les combattants du GATIA (Groupe dâauto-dĂ©fense touareg Imghad et alliĂ©s) aux Ă©lĂ©ments de la CMA. Il a fallu lâintervention des français pour sauver le mouvement qui Ă©tait en mauvaise posture Ă Kidal⊠Le Gatia a fini par abandonner la partie. En rĂ©alitĂ©, le Gatia avait subi la pression (lâintervention ?) des forces françaises et de la Minusma. Ce nâĂ©tait pas une premiĂšre.
Des responsables du Gatia et de la Plateforme avaient dĂ©noncĂ© lâingĂ©rence française en ces termes : « les français ont sauvĂ© leurs protĂ©gĂ©s ». On se souvient aussi que la plateforme avait pris la localitĂ© de MĂ©naka, le 27 avril 2015. Elle sera contrainte, Ă la faveur dâun « arrangement sĂ©curitaire » de quitter cette localitĂ©. Il sâest avĂ©rĂ© que la pression de la mĂ©diation visait surtout Ă satisfaire les dĂ©sidĂ©ratas de la CMA, qui avait fait de ce retrait un prĂ©alable Ă la signature de lâaccord de paix entĂ©rinĂ© le 15 mai 2015 par le gouvernement malien et ses alliĂ©s. Ăgalement, toujours sur fond de chantages et de fourberies, la CMA avait aussi rĂ©ussi Ă retrouver ses positions Ă AnĂ©fis, dâoĂč elle avait Ă©tĂ© chassĂ©e par la Plateforme, en septembre 2015. Pour y revenir, la CMA a dĂ» faire appel Ă ses soutiens occultes. ConsĂ©quence : lâautoritĂ© de lâĂtat nâa pas Ă©tĂ© retrouvĂ©e (Ă Kidal) et ne peut pas lâĂȘtre, puisque la France lâinterdit.