Tunisie 🇹🇳 : Plus de 90% d’abstention: les Tunisiens boudent massivement l’Ă©lection d’un Parlement au rĂ´le limitĂ©

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L’Ă©lection du Parlement tunisien, voulue par le prĂ©sident Kais Saied a Ă©tĂ© marquĂ©e par un très fort taux d’abstention. L’opposition boycottait ce scrutin pour dĂ©noncer une «dĂ©rive dictatoriale» du dirigeant tunisien.

Les Tunisiens ont boudĂ© massivement les urnes ce 17 dĂ©cembre alors qu’ils Ă©taient appelĂ©s Ă  renouveler leur Parlement, un scrutin voulu par le prĂ©sident Kais Saied pour mettre un point final au processus enclenchĂ© par son coup de force de juillet 2021.

Une nouvelle AssemblĂ©e de 161 dĂ©putĂ©s, aux pouvoirs très limitĂ©s, doit remplacer celle que Kais Saied avait gelĂ©e le 25 juillet 2021, arguant d’un blocage des institutions dĂ©mocratiques issues de la première rĂ©volte des Printemps arabes, après la chute de Ben Ali en 2011.

Le prĂ©sident de l’autoritĂ© Ă©lectorale Isie, Farouk Bouasker, a annoncĂ© un maigre taux de participation, encore provisoire, de 8,8% Ă  18h (17h GMT).

Il s’agit de la plus faible participation Ă©lectorale depuis la RĂ©volution de 2011 après des records (près de 70% aux lĂ©gislatives d’octobre 2014) et c’est trois fois moins que pour le rĂ©fĂ©rendum sur la Constitution l’Ă©tĂ© dernier (30,5%), dĂ©jĂ  marquĂ© par une forte abstention.

L’opposition se rĂ©jouit de ce «dĂ©saveu populaire»

Ce nouveau Parlement est censĂ© ĂŞtre «plus dĂ©mocratique et reprĂ©sentatif que tous les prĂ©cĂ©dents Parlements de l’histoire du pays», a ironisĂ© l’analyste Youssef ChĂ©rif sur Twitter.

Farouk Bouasker a reconnu un «taux modeste mais pas honteux», estimant qu’il s’expliquait par «l’absence totale d’achats de voix […] avec des financements Ă©trangers», contrairement au passĂ©, selon lui.

Le Front de salut national, une coalition d’opposants dominĂ©e par le parti d’inspiration islamiste Ennahdha (parti majoritaire du Parlement sortant) a qualifiĂ© ces rĂ©sultats de «sĂ©isme», appelant le prĂ©sident Ă  «rĂ©unir toutes les forces politiques» pour en discuter.

Joint par l’AFP, le prĂ©sident de cette coalition, Ahmed Nejib Chebbi, a estimĂ© que ce scrutin Ă©tait un «grand dĂ©saveu populaire» pour le processus dĂ©marrĂ© par le gel du Parlement et le limogeage de son Premier ministre le 25 juillet 2021.

«92% [des Tunisiens] ont tournĂ© le dos Ă  son processus illĂ©gal qui bafoue la Constitution», a-t-il commentĂ©, appelant Ă  la nomination d’un haut magistrat capable de «superviser une nouvelle Ă©lection prĂ©sidentielle».

Accusant depuis des mois Kais Saied de «dĂ©rive dictatoriale», l’opposition et la plupart des formations politiques boycottaient le vote, pour dĂ©noncer aussi un changement de loi Ă©lectorale, imposant cette fois des candidatures sans affiliation Ă  un parti.

Autre facteur pouvant expliquer la dĂ©saffection : les candidats (1 055), pour moitiĂ© enseignants ou fonctionnaires, Ă©taient pour l’essentiel inconnus, avec très peu de femmes (moins de 12%) dans un pays attachĂ© Ă  la paritĂ©.

Avant le vote, la puissante centrale syndicale UGTT avait jugé ces législatives inutiles.

Des pouvoirs restreints

L’AssemblĂ©e des dĂ©putĂ©s issue du scrutin (après un second tour d’ici Ă  dĂ©but mars) aura des prĂ©rogatives très restreintes en vertu de la nouvelle Constitution votĂ©e en juillet.

Le Parlement ne pourra pas destituer le président et il lui sera presque impossible de censurer le gouvernement. Il faudra dix députés pour proposer une loi et le président aura la priorité pour faire adopter les siennes.

Depuis des mois, la crise Ă©conomique est la prĂ©occupation majeure des 12 millions de Tunisiens, avec une inflation de près de 10% et des pĂ©nuries rĂ©currentes de lait, sucre ou riz. La Tunisie, dont les caisses sont vides, a demandĂ© un nouveau prĂŞt de deux milliards de dollars au Fonds monĂ©taire international (FMI), qui conditionne d’autres aides Ă©trangères.

Pour Jawhar Ben Mbarek du Front de salut national, «le peuple tunisien a envoyĂ© un message aux forces Ă©trangères et au FMI, qu’il ne reconnaĂ®t pas ce gouvernement, donc ils doivent revoir leurs calculs».

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